Croisade : RIDDLE OF FIRE
Forcément, des gamins en petite mob' pétaradante au style vintage des 80’s dans un délire heroic-fantasy, on pense immédiatement à Stranger Things. Et pourtant, le film prend rapidement ses distances avec ce conglomérat de références tapageuses, une série qui considère la jeunesse comme un pot-pourri d’émotions puériles, de rêveries idiotes et d’imaginaires bornés par les écrans. Et c’est là que Riddle of Fire est fascinant, le rêve de ces gosses est certes l’écran (une console de jeu), mais ce qui créera l’épopée et toute la trame narrative du film sera son détachement. Sortir la tête du cadre verra cette bande de trois vivre la plus folle des aventures et une improbable rencontre avec une secte new-age bien perchée. Mais pour atteindre le but ultime (le jeu vidéo donc), il faut faire une tarte aux myrtilles, et pour la réussir, avoir un œuf. Cette improbable objectif dénote avec les fameuses chasses au trésor des films de bande classiques (Les Goonies en tête). Et c’est là la réussite de Riddle of Fire, ramener l’absurdité de l’adolescence à son essence, le plaisir du jeu, de la découverte et de l’imagination débordante au milieu du rien, d’une forêt en bord de route, d’une banlieue américaine ni glauque ni blindée, l’amour simple et pur du jeu et des histoires. Et malgré, il est vrai, des maladresses et une répétitivité situationnelle quelque peu fatigante, on se laisse emporter avec cette bande de gamins dans ce délire que plus personne ne semble maîtriser, ni le script ni le réal’ en roue libre.
En résumé : Enfin un film adolescent au premier degré sans jamais jouer la carte de la nostalgie à outrance ou de la complaisance adulte, un film bancal, maladroit et parfois interminable, à l’image de nos étés gamins, ceux que l’on aurait aimés éternels. 3,5/5
Riddle of Fire de W. Razooli
Sortie le 17 avril
Exode : LE DESERTEUR
Que s’est-il passé dans la tête de Shlomi lorsqu’il a décidé de fuir les combats et déserter l’armée israélienne ? Les réponses se dessineront au fur et à mesure de cet échappatoire horizontale (et ces nombreux travelings) face à la guerre qui s’abat verticalement du ciel (les bombardements du Hamas et les roquettes contrées par le dôme de fer) : une famille qu’il aime (et cette très belle scène avec sa grand-mère), une femme qu’il désire, les plaisirs les plus usuels (un resto, une balade en vélo, une baignade en mer), ce désir de vivre, de quitter l’horreur et la violence. Mais rien ne l’empêchera d’y replonger, car à Tel Aviv, la guerre est dans chaque recoin, sur chaque écran, dans chaque discussion. L’engrenage de la désertification de Shlomi va l’amener à plonger dans le déraisonnable et le désespoir du condamné à mort. Cette chute est scorsesienne et inéluctable (dans After Hours notamment), et le visage de Shlomi est absolument bouleversant de justesse, lui qui n’arrivera plus jamais à sourire pleinement, à se réjouir librement, rattrapé par sa destinée de guerrier, de tueur au chevet d’une société intraitable et de son outrageuse fraternité (autre belle scène lorsque Shlomi se fait déshabiller par des passants dans la rue). Le film arrive donc à jouer l’équilibriste de talent en gardant une neutralité sur le conflit tout en délivrant un message pacifique loin d’être démagogique ou idiot, mais ravageur et juste : la guerre tue les corps, les cœurs, l’esprit, prive de liberté, et rien ni personne ne peut en réchapper, c’est une prison à ciel ouvert, où la fuite est impossible, et la mort en unique destinée.
En résumé : Bien sûr que le film résonne encore plus fort depuis l’éclatement de la guerre israélo-palestinienne, mais sa force est dans son universalité : la lâcheté de la guerre, son impossible fuite, et la privation dramatique des libertés qui l’accompagne. 3,5/5
Le déserteur de D. Rosenberg
Sortie le 24 avril
Paparazzi : CIVIL WAR
Au départ, c’est l’agréable surprise, Alex Garland évite le politique dénonciateur démagogique pour orienter son Civil War vers un tout autre sujet, celui du photo- journalisme, et en son centre, des reporters de guerre photographiant de New York à Washington une Amérique à feu et à sang. Malheureusement, tout s’effrite très vite, Garland se plante royalement en abaissant la respectabilité immense d’un tel métier et sa dangerosité vers du voyeurisme, les reporters se transformant en paparazzi de pacotille, assoiffés de souffrance et d’images chocs. Et à quel prix ? Celui de la liberté d’information et du désir de transmission ? Mais voyons, pas du tout, l’égo semble dominer chacune de leurs décisions. Garland se fait prendre à son propre jeu, et c’est bien lui qui ne propose que du coup de poing et des scènes inconsidérablement violentes, vides de sens, pour tenter d’immiscer un peu de politique dans ce désastre à contre-sens. Le film est donc un non- sujet, absent sur le politique, hors-sujet sur le photo-journalisme. Et donc parfaitement dispensable.
En résumé : Un condensé de ce qu’il ne faut pas faire au cinéma, se désintéresser de son sujet (ici le photo-journalisme), le ridiculiser en ne le filmant qu’à travers ses poncifs. Sur son versant politique, pas mieux, le néant. Une belle gamelle. 1,5/5
Civil War de A. Garland
Sortie le 17 avril