Si tu veux te prendre un choc visuel via le corps humain comme jamais tu ne l’as vu : DE HUMANI CORPORIS FABRICA
Dans ce documentaire choc, le réalisme franchit toute barrière, des interventions chirurgicales filmées in-vivo s’enchainent au sein d’un système hospitalier à l’agonie. En effet, la violence est plus sociale que visuelle ; malgré l’âpreté de la chirurgie, la rugosité des images médicales tranche avec une violence qui l’est fondamentalement beaucoup plus, la déliquescence des hôpitaux publiques français. Le lien médecine/cinéma se construit avec les arthroscopies (les caméras internes filmant les opérations) rendant le tout très cronenbergien avec cette chair, ce sang, ces tissus qui s’ouvrent et se décomposent, s’étirent et se referment. Le film attaque frontalement le manque de personnel (et notamment en gériatrie, où de vieilles femmes errent dans les couloirs sans aide ni attention), met en lumière les métiers oubliés et pourtant indispensables de la médecine, comme les rhabilleurs de morts à la morgue. Il explore un terrain encore jamais exposé au cinéma, une expérience immersive totale et intense.
Pourquoi il faut y aller : C’est le documentaire choc de l’année, difficile mais indispensable
Mais d’un autre côté… Le cœur doit être bien accroché, les images internes viscérales sont crues
De Humani Corporis Fabrica de V. Paravel et L. Castaing-Taylor
Sortie le 11 janvier
Si tu veux voir la force du silence face à la dégueulasserie médiatique : REWIND AND PLAY
Alain Gomis a déterré des images d’archives de l’enregistrement d’une émission de télévision française de 1969 avec pour ambition la mise en abîme du génie du jazz américain Thelonious Monk. Rapidement, l’on se rend bien compte de la supercherie, et de la manipulation systématique des images pour faire taire Monk (et notamment sur l’origine du fiasco de son concert parisien 10 ans plus tôt). Rien n’a changé. Le média télévisuel truque et habille pour détourner le regard, scénarise les questions pour mieux les édulcorer, le présentateur en grand guignol oriente la caméra à son image. Thelonious Monk a choisi la manière la plus élégante de résister : le silence, long et pesant, son piano, comme unique réponse sonore à l’abjecte manipulation d’un petit être pathétique en quête de gloire passagère face à une légende qui lui ne parle qu’à travers son rythme et ses notes. Hors du temps, et du champ, 1h en apesanteur pour contempler le génie face au vide.
Pourquoi il faut y aller : Pour la puissance d’un message suggéré en à peine quelques images d’archives
Mais d’un autre côté… Si tu préfères la hard-tech au jazz, passe ton chemin
Rewind and Play de A. Gomis
Sortie le 11 janvier
Si tu veux te prendre un shoot naturaliste espagnol : NOS SOLEILS
Ours d’or à Berlin, Nos Soleils suit les traces paysannes d’une famille intergénérationnelle responsable de la production de pêches. Rapidement, les spéculateurs débarquent et souhaitent racheter le terrain pour installer des panneaux solaires, réveillant une guerre familiale sur fond d’introspection éthique. De ce naturalisme paysan se jouent les enjeux modernes, la terre abandonnée à la spéculation, le travail de la terre anéanti par l’économie de marché, et derrière les chiffres, la réalité déchirante d’une famille tiraillée entre la survie financière (la vente de leur terre) et l’éthique paysanne (la culture de la terre coûte que coûte). L’humain est au cœur de cette fiction documentaire qui jamais ne cherche à apitoyer, mais dessine avec grandeur les tumultes interrogateurs d’une famille bousculée sur 4 générations (du petit-fils aux grands-parents) : non, le monde ne sera plus jamais comme avant, et même si des rires continueront de jaillir au milieu des pelleteuses destructrices (et cette superbe scène finale), l’avenir semble plus crépusculaire qu’ensoleillé.
Pourquoi il faut y aller : Pour la beauté foudroyante de cette famille aux interrogations existentielles
Mais d’un autre côté… Si tu n’aimes pas le cinéma du réel, ça risque d’être interminable
Nos Soleils, de C. Simón
Sortie le 18 janvier