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Y’a quoi au ciné ? – Motocross, Apocalypse et Illusion

undefined undefined 5 février 2025 undefined 10h00

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Pierig Leray


Motocross : LA PAMPA

Parti pour tracer la linéaire route du film français social pompeux, Chevrollier (dont c’est le premier long métrage) retourne radicalement son périlleux destin par sa forme romanesque euphorisante et des idées de mise en scène remarquables (cette caméra embarquée sur les moto-cross), à la fois par une écriture bluffante de maturité de l’ensemble de ses personnages. Rare est de constater une psychologie aussi développée pour l’ensemble d’un casting, ici chaque personnage est magnétique, intriguant, et arrive à dépasser son rôle initial pour surprendre et saisir (en exemple, le coach de moto-cross interprété par Artus qui ne cesse de naviguer entre une violence malsaine et une douceur poignante, le père de famille interprété par Damien Bonnard qui évoluera en parallélisme du film, et bien entendu, ce superbe face à face entre les deux personnages principaux Willy et Jojo, avec un relent très Kechiche). Par-delà l’écriture donc, Chevrollier arrive à atteindre une multitude de sujets sans jamais se paumer ou forcer, l’homophobie, le déclassement social, le deuil, la perte de repère parental, la pression adolescente, toute cette mixité s’agrège parfaitement sans jamais donner de haut-le-cœur, il y a ici une maîtrise rare pour un premier film, qui nous rappelle forcément la réussite fulgurante de Chien de la casse. Espérons pour lui la même trajectoire.

En résumé : Encore une nouvelle preuve de la vitalité sans pareille du cinéma français avec cette fresque sociale et épique qui renverse la table. Ça secoue fort. 4.5/5

La Pampa de A. Chevrollier
Sortie le 5 février


Apocalypse : LA CHUTE DU CIEL

Le monde s’effondre, et la route est toute tracée vers sa disparition. Des yeux et de la voix du peuple indigène d’Amazonie, les Yanomami, le constat est sans appel : détruire leurs forêts, c’est détruire le Monde, empoisonner leurs rivières, c’est tuer nos océans, et la guerre qu’ils sont en train perdre face aux envahisseurs brésiliens sur leur territoire, c’est notre guerre que nous perdons contre un monde en extinction. Esthétiquement merveilleux, la beauté des rituels, des visages, la beauté d’un ciel dénué de pollution, la beauté d’une nature hypothétiquement sauvage et conservée ne fait malheureusement pas le poids face à la détresse, et au constat sans appel, à la maladie qui ronge les peuples autochtones (notamment la malaria), et la disparition de ce peuple coïncidera forcément avec la disparition globale, car la force radicale de La chute du ciel, c’est de forger une union glaçante entre la survie d’un peuple situé à des dizaines de milliers de kilomètres de chez nous et notre propre survie, petits êtres inconscients et consuméristes dont l’argent est devenu le seul moteur à notre vie. Lorsque le chef des Yanomami égrène le noms des nations coupables, il n’y a plus aucun innocent, nous sommes tous, et définitivement, coupables.

En résumé : Un documentaire choc qui ne détourne pas les yeux, mais qui surtout, nous les fait ouvrir grand. Radical, mais terriblement juste. 4/5

La Chute du ciel de E. Rocha et G. Carneiro da Cunha
Sortie le 5 février


Illusion : MON GÂTEAU PRÉFÉRÉ

Dans Mon gâteau préféré, il y a la touche unique et si particulière du cinéma iranien, cette capacité à jouer de candeur et de poésie quotidienne pour brutalement nous plonger dans la violence du régime de Téhéran, nous redonner espoir, l’illusion d’un amour possible pour ensuite nous le reprendre, et nous faire comprendre que non, l’espoir actuellement n’est malheureusement pas permis. Et que la dictature iranienne prend, et ne rend jamais. Voilà ce dans quoi l’on navigue ici, une vieille dame s’amuse avec ses copines veuves autour d’un déjeuner charmant de plaisanterie puis sauve une jeune femme de la police des mœurs. Puis la dure solitude, et la quête d’un homme qui égayera sa vie. Et lorsque ce dernier arrive, une nuit qui semble éternelle s’ouvre alors. Des rires et des danses, du vin, beaucoup, un selfie flou, une douche habillée et un amour qui se dessine, la joie simple de ne pas être seul, et la nostalgie d’un Téhéran d’antan, temps de grâce et de tous les possibles. Mais comme l’illusion de liberté qu’offre le régime, c’est ici une illusion d’amour. Jusqu’à sa terrible disparition, métaphoriquement brutale, avec en toile de fond un espoir vain et disparu. Là aussi, une preuve implacable de la vitalité du cinéma iranien, et ce malgré les immenses contraintes connues, un film d’une froide et terrible beauté.

En résumé : Un film à l’image du cinéma iranien, souvent poétique et candide, mais d’une réalité terrible et intangible. 3.5/5

Mon gâteau préféré de M. Moghadam et B. Sanaeeha
Sortie le 5 février