Composée de seize scénettes fonctionnant de manière indépendante bien que reliées par un fil rouge et mot d’ordre – "mythologies" –, l’œuvre était la promesse d’un show à la collaboration alléchante. D’un côté un chorégraphe au sommet de son art, et de l’autre un producteur surfant sur toute l'influence, passée et future, qu'il exerce sur la musique électronique, mais en quête d’un nouveau challenge : écrire des partitions de musique orchestrale. Mais vous connaissiez les Daft Punk, hors de question de prendre toute la lumière. Thomas Bangalter continue de suivre cette ligne directrice de compositeur de l’ombre, le producteur ayant mis un point d’honneur à ne pas mettre en avant son nom sur l’affiche. Puis le nom d’Angelin Preljocaj suffit côté prestige…
Le chorégraphe, directeur de son propre ballet, compte 56 pièces à sa charge dont quelques-unes demeurent encore des références, comme Hallali Romée, Roméo et Juliettes, Paysage après la Bataille ou encore Le Funambule. Il fait également partie de ces chorégraphes qui n’ont pas peur de ramener de la musique électronique sur les planches, collaborant notamment avec Air et Laurent Garnier.
© Jean-Claude Carbonne
Côté planches, les 16 scénettes de Mythologies s’enchainent avec précision et fluidité, malgré un léger manque de lien entre elles qui nous fait décrocher par moments... Grandioses, les danseurs du Ballet Preljocaj et du Ballet de l’Opéra National de Bordeaux occupent l’espace et interprètent des thèmes passés et contemporains comme le féminisme, les rapports de genre, la relation amour-violence. De la figure mythologique du catcheur théorisée par Roland Barthes au Minotaure – remarquable, dans une mise scène du labyrinthe particulièrement haletante où des plaques mobiles illustrent une course-poursuite entre le monstre et une femme qui lui est offerte en pâture – en passant par le Royaume des Amazones, plusieurs pans des différentes mythologies sont narrés, à chaque fois dans des décors somptueux. Et puis quand même, qu’ils sont forts ces danseurs pour nous faire passer des émotions, bien aidés par le travail de la costumière et créatrice de mode Adeline André. Pas de doute, Angelin Preljocaj sait s'entourer et tirer le meilleur de ses équipes créatives.
Une grande promesse
Côté musique, pour succéder aux grands noms qui ont travaillé avec Preljocaj, Thomas Bangalter a mis de côté son amour pour la musique électronique. C’est dans un style musical puisant dans les différents registres des rythmiques de danses occidentales traditionnelles qu’il a choisi de tirer son inspiration. Quelques minutes dans un style baroque lyrique puis des rythmiques de valses romantiques interprétées par le réputé Orchestre de Chambre de Paris… Malheureusement, on a du mal à rentrer dedans. Bien que belle et sans accroc, la musique ne semble pas vouloir se démarquer de la danse... Trop contemplative, peut-être ? Elle passerait presque inaperçue face à la performance des danseurs. Une critique qui avait déjà été faite aux robots pour leur travail sur la bande originale du film TRON: Legacy. Mais sûrement en attendions-nous trop de la moitié de Daft Punk ?
Mythologies se joue au Théâtre du Châtelet jusqu’au 5 novembre.