Hier, au bureau, alors qu'on se baladait sur notre fil d'actu Facebook entre deux articles, voilà qu'on découvrait ce magnifique post de Jeff Mills. Inutile de vous présenter la légende techno de Détroit, et inutile de vous dire à quel point l'artiste représente un véritable emblème de cette culture électronique. C'est alors en tant porte-parole et défenseur de cette culture que Jeff Mills nous le rappelle : la musique électronique, est un art, et ceux qui diront le contraire ignorent tout de la complexité et de la magnificence de cette culture.
Alors qu'il a bousculé les codes avec son label engagé « Underground Resistance », et prouvé à maintes reprises que la musique électronique pouvait toujours se dépasser en se nourrissant du cinéma, du classique et de la science-fiction, Jeff Mills s'offusque qu'encore aujourd'hui on puisse dire de cette culture qu'elle est facile et pauvre.
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Déjà, dans un entretien avec l'AFP cet été, Mills avait pointé du doigt de manière très juste le problème suivant : « J'ai produit près de 70 albums en 35 ans mais presque aucun n'est joué en ce moment à la radio (...) qui est juste intéressée par le côté "pop" de la musique électronique. Les gens préfèrent désormais la techno facile, un peu "bubblegum" plutôt que celle plus profonde, avec un message ».
Un problème qui le rend soucieux, car d'après lui la culture underground et ses fondements de base – politiques, engagés, profonds – se perdent, au profit d'une culture électronique bien plus marketing. Autre problème que Mills souligne aujourd'hui sur ses réseaux : la musique électronique est un art à part entière trop peu souvent considéré comme tel. Alors en 10 points basés sur les règles de bienveillance, celui qu'on appelle « The Wizard » déconstruit les idées reçues.
Voici ses 10 points fondamentales :
" 1. C'est si facile et souvent amusant de sublimer les événements dans cette industrie. Je suggère qu'on cesse avec cette envie de banaliser les artistes et ce qu'ils disent ou produisent. À la place, regardez plutôt ce qu'ils ont fait. Les actions sont souvent plus fortes que les mots.
2. Apprenez à parler correctement de la musique. Pas en termes de « bien » ou de « mal », mais plutôt en prenant compte de ce que l'artiste essaye de dire. Si vous avez des difficultés à comprendre le sens, demandez-leur.
3. L'industrie des musiques modernes est encore relativement nouvelle. Même pas 100 ans. Comme c'est la cas pour tout, si on ne prend pas soin d'elle, il n'y a aucune raison de croire qu'elle ne disparaîtra pas, au point peut-être de devenir autre chose. Prenez soin de ce que vous aimez.
4. Il y a « l'industrie de la musique » et puis il y a « l'art ». Ce n'est pas souvent que les deux peuvent être maîtrisé en même temps. Pour certains, ça peut prendre un moment afin de comprendre pleinement les deux côtés. Sans toujours passer du jugement, il suffit de regarder et d'écouter.
5. Parfois, le public peut se tromper. À moins que tout le monde soit automatiquement né avec une connaissance profonde de la musique, il est possible pour de grands groupes de personnes de la sous-estimer. Ce n'est qu'avec le temps que la vraie vérité émerge. Mais ce n'est pas parce que vous croyez fermement quelque chose que c'est nécessairement vrai ou faux. Faites attention à ce que vous lisez. Renforcez et mettez à jour vos vos connaissances.
6. La musique ne recherche pas toujours la perfection. Et si vous pensez que vos goût et votre perception relèvent de la perfection, alors considérez ceci : Quand vous entendez de la musique, ce n'est qu'un pourcentage de ce que le producteur essaie de dire. Ça, c'est vrai. Et les sentiments complets ne sont généralement jamais complètement extraits et traduits en notes et accords précis. Il y a beaucoup de compromis à faire dans le processus. Certains musiciens ne l'ont jamais compris alors comment peut-on supposer que ce que vous entendez est parfait ?
7. Bien que l'industrie de la musique lutte encore dans certains domaines, il est important de se rappeler que ce sera la "musique" dont les gens se souviennent le plus. Pas le festival, pas la vidéo, ou la critique. La contribution d'un musicien, mesurée comme l'importance du genre sera l'aspect le plus important que nous allons reconnaître.
8. Mixer des morceaux ensemble ne fait pas de n'importe qui un DJ. Savoir gérer une foule demande un talent spécial qui implique la perception atmosphérique, la gestion du temps, le bon jugement et surtout, la réalité que vous ne satisferez jamais de tout le monde.
9. Peu importe ce que les autres disent, il n'y a pas de meilleur DJ ou artiste. Ca n'existe pas. Ça a été inventé juste pour des raisons marketing.
10. Et enfin, toute personne ayant décidé d'être un artiste ou un musicien doit décider qu'il veut donner quelque chose de spécial au monde et à la culture. Oui, ils pourraient aussi vouloir être riches et célèbres, mais il y a d'autres façons plus rapides de le devenir. Apprécier quelque chose pour ce qu'elle est, et non pour ce qu'elle pourrait être, peut apporter un ressenti bien plus bénéfique que vous ne pouvez l'imaginer."
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