Art majeur : le Berghain classé haut lieu culturel

undefined 14 septembre 2016 undefined 00h00

Agathe

L’aura du Berghain lévite tel un fumet de raclette en plein mois de janvier. A son évocation, la salive afflue aux commissures des lèvres et l’idée même de s’y rendre un jour éveille chaque teuffeur averti. Le mythe vient officiellement d’être reconnu « haut lieu culturel » par les autorités berlinoises, de quoi ravir plus d’un militant insomniaque. Mais pourquoi ce titre, exactement ?

Le crédit donné à ce rendez-vous international de la scène électronique n’a pas été ici le centre de la discussion. La bataille s’est jouée sur un nuancier tout à fait différent : le calcul des taxes imposées à cet espace de " divertissement ". En effet, cette distinction accordée au Berghain par le tribunal administratif de la région de Berlin-Brandebourg est en réalité le fruit d’une bataille fiscale de longue date entre l’établissement et les pouvoirs publics.  

L’histoire débute en 2008. Jusqu’alors, tout comme les théâtres, les salles de concert et les musées, le Berghain ne devait que 7% d’impôt sur le revenu. Puis, boum ! Patatra ! Le ministère des finances de Berlin décida que le club dû être taxé en tant « qu’espace de divertissement », c’est-à-dire à hauteur de 19%, et surtout, à hauteur de millions d’euros à verser de manière rétroactive. Sympa.

La manœuvre fut alors justifiée par un argumentaire démontrant que la boite ne dispose d’aucune scène à proprement parler ni d’aucun début suivit de fin applaudis encadrant les performances artistiques qui y ont lieu.

Selon le Guardian, c’est sur un appel du Berghain que le journaliste de Der Spiegel, Tobias Rapp, a rédigé un rapport allant à l’encontre de la décision administrative. Le journaliste et auteur d’un ouvrage majeur sur la culture club berlinoise (Lost and Sound : Techno, Berlin and the Easyjetset), a ainsi mis en lumière le fait que les gens s’y déplacent principalement pour la musique. Le Dj serait comparable à un chef d’orchestre, et le club a accueilli nombre de concerts de classique, de ballets ou encore d’expositions.

Si la question de l’empreinte de la drogue dans cet espace de fête a été plus difficile à justifier, le Berghain vient donc finalement d’obtenir gain de cause de la part de la cour. Décision clôturant une vulgaire joute juridique pour une ultime étiquette, prétexte à payer 7% d’impôt seulement. Humpf.

On rappellera que le Berghain, en plus d'être un temple de la techno, est également un lieu où l'on peut se faire pipi-caca dessus tout nu alors que toutes sortes d'extravagances rythmes les vagues humaines qui s'y incèrent chaque semaine. Un théâtre, certes, mais pas forcément d'art majeur.

A la rigueur, le titre est pompeux, on est donc très contents pour eux et pour la santé de leurs finances. Longue vie à la haute culture.