Avec Tardes de Soledad (sortie le 26 novembre), Albert Serra s’imaginait en grand seigneur du réalisme, victorieux sur sa terre originelle du Grand prix du festival de San Sebastian, seconde couverture pétulante des Cahiers du Cinéma (après celle pour Pacifiction en 2023), son égo qui n’avait vraiment pas besoin d’autant de louanges doit aujourd’hui difficilement passer les pas de porte. Mais il n’y a pas de film, car il n’y a pas de sujet, esthétiser la mise à mort animale, relancer le faux débat de la corrida comme un vieux crouton grabataire la défendrait dans le bistro du coin n’a aucun sens. A part celui de faire mousser son propre désir pervers et narcissique de jouer avec la maltraitance animale à des fins égoïstes ; il n’y a pas de cinéma là où il y a l’inhumanité gratuite, il n’y a pas de film là où il n’y a ni sens ni sujet. Rien, ni personne, pas même le grand Albert Serra, ne peut justifier une telle mise en scène vomitive, l’œil de l’animal mourant, souffrant, pour la jubilation coloniale et impérialiste d’un versant d’une culture espagnole archaïque. Pour relancer un débat qui n’existe plus ? Pour moquer le machisme idiot et déplorable d’un toréador grimé en poupée de chiffon ? Montrer, démontrer l’absurde de la pratique ? Or, il n’y a ni absurdité, ni ironie ou petit jeu malsain (à l’image de son film Liberté) là où il n’y a pas de film, car son sujet est infilmable. Serra et son non-film n’auront donc pas un mot de plus ici. Attardons-nous plutôt sur une comédie belge qui fout une belle claque de jouvence à nos comédies françaises ringardes (Aimer perdre), un documentaire sur des adieux adolescents (Ce n’est qu’un au revoir) et un film iranien sur 30 ans de répression contre l’immigration afghane (Au pays de nos frères).