Montreuil : le lieu multiculturel Velvet Moon a plus que jamais besoin d'aide pour survivre

undefined 4 février 2021 undefined 17h27

Manon Merrien-Joly

Depuis un an, la stratégie du stop and go a mis un sacré coup de massue aux associations culturelles qui dépendent de leur public pour (sur)vivre. Le Velvet Moon, espace associatif féministe écoresponsable en fait partie et a lancé sa campagne de crowdfunding "SOS de velours" pour permettre à ses adeptes de précommander tatouages, cocktails, illustrations et pièces uniques... et contribuer à sa survie.

Une dizaine de résidents évoluent dans les espaces, dans une hybridité et une richesse culturelle qui met des paillettes dans nos vies : les arts visuels y ont une large place avec Maison Mourcel, une marque d'upcycling et le stydio de tatouage Les amours ImaginairesCôté musique, le Velvet accueille deux studios de son. On y trouve Simon du collectif Beat & Changers, Myr, auteur d'un projet de contes autour des arts sonores et deux producteurs et compositeurs : Steve et Pierre aka Pee Magnum qui vient de sortir son dernier album Distant.

Les arts scéniques sont représentés avec la compagnie Dikie Istorii dont font partie Vincent, qui produit de l'électro-accoustique, Arnaud, danseur et producteur musical (hip-hop, pop urbaine, musique douce), Chandra, danseuse et performeuse qui évolue aussi dans le duo Hoodsflakes (braquage artistique) qu'elle constitue avec Tom, danseur, performeur et DJ.

 
Le Bonbon Nuit : comment avez-vous créé et imaginé le Velvet Moon ? Quelle est son histoire ? 

Miad : Albane et Nissa avaient créé une fripe itinérante, Mermaid Express, et organisaient pendant les ventes des événements, de la scénographie et beaucoup de fêtes. Moi, en parallèle, je travallais dans des bars dans le monde de la nuit, j’avais monté mon bar à cocktails itinérant... on s’est invitées mutuellement dans nos événements. Un jour, Albane a eu l’idée d’ouvrir son propre lieu avec Nissa, et dans ce lieu-là, elle imaginait un bar, une buvette... et elle m’a appelée pour prendre part au projet. J'arrivais à un moment de ma vie où je voulais me poser. On a monté le projet, on a imaginé la programmation, la résidence artistique... Puis on a visité un lieu à Montreuil, des anciens bureaux avec des espaces bien différents : les filles avaient du contact dans le tattoo, Lucie (créatrice de la marque d'upcycling Maison Mourcel, ndlr) est une amie d’enfance qui cherchait un atelier. Pour les studios de son, on avait un gros réseau dans la musique, on a commencé avec du tattoo, du stylisme, de la musique puis on a imaginé par la suite des repas végétariens, les cinéclubs, les expos…

 
Albane, cofondatrice du Velvet Moon © Thomas Reka pour Le Bonbon Nuit

Comment avez-vous vécu la crise sanitaire en tant que collectif et en tant qu’association culturelle ?

Miad : La partie logistique a été hyper compliquée, parce qu’on a été mis dans la case des "non-essentiels", on a dû fermer. On est une association culturelle, mais avec un loyer à payer, à but non lucratif avec un bail commercial et non-employeuses, ce qui fait qu'on n’a pas accès aux aides de la mairie. On bossait depuis plus d’un an de manière bénévole, ça a été un coup dur parce qu’on a compris tout de suite qu’on était en danger, qu’on serait exclues si on ne payait plus le loyer.

On payait les charges avec la programmation, depuis l’hiver 2019 on a eu les conséquences des grèves, des gilets jaunes... puis du covid. On s’est retrouvés dans un vortex où on n'était éligibles ni aux subventions ni aux aides. Le résultat en tant qu’individus, c'est que ça a été une énorme dose de stress. Nous n'avons eu aucun soutien administratif : même au-delà de l’argent, on voulait savoir comment on pouvait ouvrir en respectant les conditions sanitaires, on a appelé la maison des associations, la Préfecture de Police, personne n’était en mesure de nous donner des infos sur ce qu’on avait le droit de faire ou non, ni si on pouvait avoir des aides.


Le duo de danseurs Hoodflakes © Thomas Reka pour Le Bonbon Nuit

Le stress s'est accompagné d'un sentiment d’inconsidération. On abrite tous les secteurs hyper impactés par la crise sanitaire entre l’art, la mode, le tatouage... c’est la pire période pour la culture et le monde des artistes. Il y a eu un grand mouvement de solidarité entre nous, comme on est tou.te.s passionné.e.s, on a voulu trouver des solutions et se battre, rester actif, dès le déconfinement, ça a été assez cool, malgré le fait qu’on a été dans la merde jusqu’au cou, on s’est retroussés les manches pour sauver le lieu.

 
En quoi consiste votre campagne de crowdfunding SOS de velours ?

Albane :  On a eu l’idée de créer cette campagne par nécessité absolue de trouver des fonds, étant donnée l'absence d'aide de la mairie, de la banque, de notre propriétaire... On avait un peu du mal à demander de l’argent "juste comme ca". On est plutôt des "giveuses" que des "takeuses", le lieu permet de faire tellement de choses qu’on peut proposer en avance tout ce qu’on faisait avant : des cocktails, des pièces de créateurs, des locations de salles, des prints, des photos... On ne veut pas avoir plus d’argent, on veut juste assez d’argent pour préserver le lieu jusqu’à ce qu’il réouvre.  

 
Comment peut-on vous aider en cette période ?

Albane : On a eu par exemple un torréfacteur qui ne pouvait pas donner d’argent, mais qui nous a donné du café. Ce sont des choses simples, mais importantes pour le fonctionnement d'une asso ; il y a une fille, Laetitia, qui nous aide gracieusement dans la campagne de publicité. Ce sont plein de mobilisations qui font hyper plaisir : si les gens nous contactent, on est hyper ouvertes et on a envie de préparer la réouverture. Si on peut agrandir le gang, la famille et que, quand on rouvre, il y ait encore plus de gens pour faire marcher le lieu, on est vraiment pour. Je tiens à dire que les gens sont hyper mobilisés pour la cagnotte, on a de la chance d’être bien entourées, on veut remercier les gens qui nous donnent de la gnaque, ça contrebalance l'impression d'avoir été oubliées à plein d'endroits différents. 


Morgane, responsable du studio de tatouage Les Amours Imaginaires © Thomas Reka pour Le Bonbon Nuit

Miad : la campagne est toujours en cours, il y a encore des ateliers, des pièces, si les gens se mobilisent avec nous on pourrait être un peu plus sereines. La cagnotte nous aide et il faut savoir que, s’il y a un prochain confinement, ça va nous remettre un énorme coup dur. Pour les gens qui ne peuvent pas donner, relayer, parler de nous... c’est déjà énorme.

 
Comment envisagez-vous la suite ? 

Albane : si actuellement seul le salon de tatouage est ouvert, le tatouage ne représente pas l’entièreté du projet, même si ça nous fait vivre. On cherche aussi des solutions et des alternatives sur le plan culturel, dans le respect des restrictions. On souhaite sauver le Velvet Moon, le projet d’origine, on cherche des solutions tou.te.s ensemble : on est tou.te.s en contact pour développer des idées et trouver des alternatives pour se stimuler un peu et faire vivre le lieu tel qu’on l’avait imaginé à la base. 


Miad, cofondatrice et barmaid du Velvet Moon © Thomas Reka pour Le Bonbon Nuit

Pour aider à sauver le Velvet Moon, on vous invite à faire un don sur Hello Asso ici, et pour leur donner un maximum d'amour, ça se passe sur leur compte Instagram par là